Des jeunes et des lettres

Florilège des retours de lecture

Grand prix de littérature dramatique jeunesse

 Grand prix et coup de cœur du Comité de lecteurs DJL

 Les séparables de Fabrice Melquiot (L’Arche Editeur) 

« C’est une belle histoire d’amitié et d’amour entre Sabah et Romain. Les personnages sont touchants. J’aime beaucoup leur franc-parler. C’est ce qui me permet de dire que je trouve l’écriture de la pièce très juste car elle reflète bien la manière d’être des enfants de cet âge tout en mettant en scène leur imaginaire. »
« C’est la pièce où l’écriture est la plus onirique, et donc ma préférée. »
« L’angle nuancé choisi pour aborder le racisme, dans la sphère familiale, le couple parental et le caractère vide de sens qu’il peut prendre dans la bouche des enfants, est intéressant. »
« La pièce questionne la société, ses HLM et son absence de mixité et met la candeur des enfants face aux racismes. »
« L’histoire m’a beaucoup intéressée parce qu’elle m’a touchée sur une dimension très profonde chez chacun de nous, qui est celle des relations humaines, comment on interagit avec l’autre, pourquoi on en a peur peur parfois, mais aussi, comment on peut comprendre l’autre et en tomber amoureux… »

Les deux autres finalistes

 Trois petites soeurs de Suzanne Lebeau (Editions Théâtrales)

« Comment faire face à la mort d’un enfant ? Les personnages parlent à tour de rôle et se complètent, comme pour un dialogue, mais pour narrer une seule et même histoire. Cela sert à la fois la théâtralité et le propos ; la famille est unie, unie pour raconter une histoire qui n’est pas tout-à-fait la leur, mais dont ils sont les protagonistes.L’histoire est forcément touchante, non seulement parce qu’elle traite de la mort d’un enfant, mais parce qu’elle décrit un quotidien familier avec ses défauts, ses compromis, ses habitudes et ses relations entre sœurs. La question du vivre ensemble et traverser des épreuves ensemble est toujours importante à poser et à revoir. »
« Je trouve que pour être une pièce sentimentale, elle n’en est pas pour autant sentimentaliste. En effet, les sentiments ne sont pas lourds, ils sont justement amenés. Le moment “espoir” de la pièce est écrit de manière très efficace car bien que l’on connaisse la fin (grâce à la 4e de couverture), on se retrouve un court instant à croire à la guérison d’Alice. La fin non plus n’est pas larmoyante. »

 Michelle doit-on t’en vouloir d’avoir fait un selfie à Auschwitz de Sylvain Levey (Editions Théâtrales)

« Le texte est intéressant parce qu’il pose des questions essentielles sur les limites de nouveaux faits sociaux (les selfies, les réseaux sociaux) qui sont profondément déréglées. Sur Internet, les limites sociales que l’on s’impose et qui nous sont imposées dans “la vraie vie” semblent être totalement caduques. Ainsi, sur internet, on peut partager une photo de soi où l’on sourit devant les camps de la mort. Sur Internet, on peut menacer de mort une petite collégienne. »
« La pièce montre que l’effondrement de ces limites est dû aux réseaux, et pas aux enfants, comme certains peuvent le croire. Ce ne sont pas les enfants qui n’ont “plus aucun respect”, mais bien les réseaux qui promeuvent le paraître et la mise en scène permanente de sa vie. Ainsi, Michelle sourit sur la photo, mais Sélim pleure dans la “vraie vie”. Les enfants restent des enfants et tirent la langue aux défaitistes qui rendent la nouvelle génération responsable de tous les maux. »
« J’ai également trouvé intéressant la façon d’utiliser la grammaire, la syntaxe, les codes des réseaux sociaux comme un véritable langage pour écrire cette pièce. Cela montre que plus qu’un outil, Internet est également devenu une culture, avec ses propres codes, sa propre langue, qui relient entre eux ceux qui les partagent. L’auteur aborde ce sujet avec beaucoup d’aisance et de résiliation. Il fait un constat, plutôt qu’une critique passéiste. Ainsi, il constate les changements, les progrès, mais aussi les dérives, en donnant toujours la parole aux premiers concernés. »

Grand prix de littérature dramatique

Grand prix

 Quand toute la ville est sur le trottoir d’en face Jean Cagnard (Editions Espaces 34)

‘J’ai beaucoup aimé lire cette pièce. Elle alterne avec agilité entre l’absurde et les réflexions existentielles. Les deux personnages m’ont fait penser à Didi et Gogo dans En attendant Godot de Beckett. »
« La cadence irrégulière du dialogue traduit très bien l’instabilité du personnage du toxicomane. Le style m’a paru, quant à lui, très beau, rempli d’images flashs. »
« Comme on entre dans le monde d’une personne prenant de la drogue, la réalité est un peu altérée. On est donc face à la réalité du patient qui n’est pas la nôtre et qui nous amène dans un monde surréaliste dans lequel agit et parle parfois l’éducateur et qui prend part au jeu du patient. »
« Ce qui m’a marqué c’est la réflexion que fait l’auteur à un moment donné sur la dépendance entre le toxicomane qui dépend de la drogue et l’éducateur qui dépend lui-même de l’état du toxicomane. »

Coup de cœur du Comité de jeunes DJL

 Mayday Dorothée Zumstein (Editions Quartett)

« Un style immersif et un rythme prenant. ».
« Le personnage de Mary est intéressant : on accède petit a petit à sa psychologie bien qu’elle reste toujours très mystérieuse. »
« Les voix et le son sont vraiment mis en avant, ce qui rend le texte vivant et intriguant. Les personnages sont extrêmement complexes, ils se mélangent et se distinguent successivement. Tout ce travail autour d’un univers auditif rend vivante la langue et donne envie d’entendre ce texte réciter par des acteurs. »
« L’histoire m’a plu bien qu’elle soit très sombre. J’ai été tenue en haleine tout au long de la pièce, voulant connaître la fin de ce thriller dont le suspens est très bien mené. »
« Beaucoup de choses sont implicites et cette façon d’aborder le meurtre et l’héritage familial est très intéressante. »

Les trois autres finalistes

 Poings Pauline Peyrade (Les solitaires intempestifs)

« L’écriture et l’histoire se forment autour du souvenir horrible de cette femme ayant vécu une relation toxique et violente avec son conjoint. »
« Ce texte ne cherche pas à expliquer ni à comprendre ce mécanisme de dépendance, il nous présente les pensées d’une femme vivant cette situation. Nous sommes simples spectateurs des pensées du personnage, ce que je trouve intéressant. »
« L’auteure écrit ce texte comme une chanson avec sa partition, ses rythmes et sa tonalité. »
« Le message que fait passer l’auteure est vraiment fort. En temps que femme c’est difficile de lire cette histoire sans réagir. »
« A certains moments, l’histoire est difficile à suivre comme si on retrouvait la détresse et l’incompréhension dans laquelle se trouve le personnage principal : ses propres sensations et souvenirs dominent la clarté des faits. »
« L’histoire touche par sa violence et nous transmet la peur et l’inquiétude du personnage. On ne peut pas lire ce texte sans s’y sentir plongé. »

 Berlin Sequenz Manuel Antonio Pereira (Editions Espaces 34)

« La langue est très vivante. Le style est brut et concret. »
« J’ai adoré la différence des points de vues des personnages, les débats, les dialogues, les thèmes abordés, la rage et la passion de tous ces jeunes qui veulent faire changer le monde et le soutien qu’ils s’apportent malgré leurs divergences. »
« L’histoire pose des questions qui me semblent importantes pour questionner notre société et notre monde et tente même d’y répondre avec des avis multiples. »
« Une réflexion profonde est faite sur comment servir une cause pour laquelle on se bat et sur l’extrémisme. Plus globalement, les personnages dénoncent la société de consommation dans laquelle nous vivons qui nous déshumanise, ce qui me paraît un sujet essentiel à traiter de nos joursJe me suis sentie complètement concernée par le sujet. »

 Aphrodisia Christophe Pellet (L’arche Éditeur)

« Cette pièce aborde une série de réflexions critiques sur la vie que nous menons dans la société actuelle d’une manière qui m’a passionnée. Le questionnement sur l’utilité et la fonctionnalité des gens et des choses m’a beaucoup interpellée. De plus, ce texte aborde l’amour et les relations sexuelles de manière assez complexe entre soumission et domination, ce qui m’a paru intéressant. »
« Le vieillissement très rapide des personnages qui disparaissent et sont remplacés par une nouvelle génération, nous apporte une vision de leur vies dans leur ensemble ainsi qu’une réflexion sur ce que c’est que de devenir un adulte, vieillir, se conformer petit à petit aux règles instaurées par la société. »
« J’ai beaucoup aimé le passage du temps, le fait que les personnages passent de la vingtaine à la cinquantaine, et que l’histoire s’étende sur trois générations. Tout se passe à grande vitesse, rien n’est palpable et tout semble pouvoir disparaitre d’un claquement de doigts. Pour moi, cela reflète la futilité et la vanité de l’existence des différents personnages du livre. »
« J’ai aimé que l’auteur introduise des personnages LGBT, ce qui n’est pas très fréquent, tout en questionnant la place du père dans la vie d’un enfant. »
« On pourrait comparer cette histoire à celle d’un phénix qui renaît de ses cendres, c’est la première image que j’ai eu en lisant le livre, et c’est celle qui me reste en tête. »